4. Béorf

Comme leur nouvel ami Barthélémy le leur avait suggéré, Amos et ses parents s’installèrent dans une jolie auberge, tenue par la mère du chevalier. Ils étaient heureux de pouvoir enfin se reposer. Le vieux matou aveugle qu’ils avaient adopté se trouva vite un coin pour dormir tranquille.

Urban, lui, trouva par la même occasion du travail. Le toit de l’auberge était à refaire et, depuis la mort de son père, c’était Barthélémy qui s’occupait des travaux d’entretien. Malgré beaucoup de bonne volonté, le chevalier n’était pas très habile de ses mains et c’est avec plaisir qu’Urban accepta d’arranger ce qui avait été mal fait. En échange, il pouvait disposer, avec sa femme et son fils, d’une grande chambre bien éclairée et confortable. Ils seraient également nourris si Frilla voulait bien donner un coup de main à la cuisine, ce à quoi elle consentit avec empressement. Ces ententes furent conclues dès le lendemain de leur arrivée, et les Daragon prirent rapidement possession de leur nouveau logis.

L’auberge avait pour nom Le blason et l’épée. À Bratel-la-Grande, c’était l’endroit de rencontre préféré des chevaliers. Les soldats s’y réunissaient pour trinquer ensemble, parler des dernières batailles ou jouer aux cartes. Du lever du soleil jusqu’à tard dans la nuit, il y avait toujours quelqu’un pour raconter un fait d’armes, pour se vanter de ses exploits ou simplement pour se distraire entre deux missions. Les barbares du Nord envahissaient fréquemment les terres du royaume, et les grandes batailles n’étaient pas rares. Le père de Barthélémy, qui avait été un grand chevalier, était lui-même mort au combat. Ses exploits étaient encore souvent évoqués. Il était toujours vivant dans la mémoire de ses compagnons d’armes, et le récit de ses prouesses émouvait à tous coups la veuve.

Lorsqu’ils étaient de passage à Berrion, les chevaliers des royaumes voisins s’arrêtaient toujours à l’auberge Le blason et l’épée pour échanger les dernières nouvelles et vanter leur habileté à l’épée. C’était un lieu vivant, toujours grouillant de monde, où les rires et les histoires les plus farfelues se faisaient entendre à toutes heures du jour.

L’auberge était spacieuse, bien tenue et entourée de magnifiques rosiers. Située à une bonne distance du centre de la ville, cette maison à deux étages en pierres rouge foncé avait fière allure. Yaune le Purificateur, seigneur de Bratel-la-Grande et maître des chevaliers de la lumière, s’y rendait souvent, soit simplement pour se détendre, soit pour discuter avec ses hommes. Pour un garçon curieux comme Amos, cette auberge où on était toujours les premiers à être informés de ce qui se passait dans le royaume et les alentours était un endroit de rêve.

Les chevaliers parlaient souvent de la malédiction qui s’était abattue sur plusieurs villages. Personne n’arrivait à expliquer ce qui avait pu transformer chacun de leurs habitants en statue de pierre et, par mesure de précaution, on avait fait évacuer les campagnes avoisinantes. Les paysans qui étaient demeurés chez eux malgré les avertissements des chevaliers avaient, eux aussi, été victimes du terrible maléfice. En fait, quiconque passait la nuit à l’extérieur des murs de la capitale se voyait frappé par ce sortilège.

En ville, on parlait souvent d’un bataillon qui, envoyé par un royaume voisin pour prêter main-forte à Bratel-la-Grande, avait été retrouvé pétrifié dans la forêt. Les détachements de cavalerie voyaient régulièrement des chouettes, des hiboux, des cerfs ou des loups changés en pierre. Et tous ces cris venant des profondeurs des bois, qu’on entendait toutes les nuits, ne faisaient rien pour rassurer qui que ce soit. Des hurlements stridents qui glaçaient le sang de tous les habitants de la ville. Des clameurs qui, chaque nuit, se rapprochaient un peu plus des fortifications de la capitale.

Les chevaliers devaient affronter un ennemi invisible, toujours caché dans les profondeurs des ténèbres. Cette force adverse, tellement puissante qu’elle semblait invincible, ne pouvait être constituée d’un seul individu. Tous ceux et celles qui avaient succombé aux pouvoirs dévastateurs de ces guerriers de la nuit étaient désormais incapables de dire un seul mot à leur sujet. On aurait voulu trouver des indices, avoir des précisions sur leur apparence physique, sur leurs intentions, mais les statues de pierre demeuraient muettes. Tout comme les habitants de la ville, Barthélémy et ses compagnons étaient inquiets, et Yaune le Purificateur semblait s’égarer en brûlant de présumées sorcières et de faux magiciens. On ne savait que faire pour combattre ce mal obscur qui menaçait tous les êtres du royaume.

Une semaine s’était écoulée depuis l’arrivée d’Amos et de ses parents dans la capitale. Même s’ils étaient contents de leur sort, ceux-ci trouvaient qu’ils s’étaient déjà attardés un peu trop longtemps à Bratel-la-Grande et avaient décidé de reprendre la route, d’ici quelques jours, pour se rendre au bois de Tarkasis. La ruse utilisée par Amos à l’auberge La tête de bouc avait rapidement fait le tour de tous les chevaliers de la ville. Barthélémy avait pris un plaisir évident à raconter à ses compagnons comment le jeune garçon avait cloué le bec du commerçant malhonnête. Amos était fréquemment salué par des inconnus qui le félicitaient d’avoir remis l’aubergiste véreux à sa place.

L’enfant faisait souvent de longues promenades dans la ville. Il déambulait nonchalamment, en découvrant les petites rues et les minuscules boutiques d’artisans. Un grand marché avait lieu tous les matins, sur une place qui se trouvait au centre de la ville, juste en face de l’immense demeure fortifiée de Yaune le Purificateur, C’est là qu’Amos vit un garçon marcher à quatre pattes sous les étals de différents marchands. À peine un peu plus vieux que lui, il était gras comme un porcelet et avait des cheveux blonds très raides. Malgré ses grosses fesses et ses bourrelets, il se déplaçait avec une prodigieuse agilité. Rapide comme l’éclair, sa main saisissait des fruits, des morceaux de viande, des saucissons et des miches de pain sans que personne ne s’en aperçoive. Une fois que son sac fut plein à craquer de provisions, le garçon quitta le marché.

Curieux, Amos décida de le suivre discrètement. Il remarqua alors avec surprise que le jeune voleur portait des favoris bien fournis. Celui-ci tourna au coin d’une rue et se dirigea rapidement vers l’un des murs fortifiés de la ville, situé loin de toutes habitations. Arrivé au pied du mur, il regarda furtivement autour de lui et, tout à coup, il disparut ! Amos n’en croyait pas ses yeux. Il s’approcha prudemment de l’endroit où s’était arrêté le garçon et y découvrit un trou assez profond. Le gros garçon n’avait pu que sauter dedans, ce qui expliquait sa disparition soudaine.

Amos se glissa à son tour dans le trou et trouva, au fond, un long tunnel, creusé grossièrement, qui passait sous la muraille. Il le suivit et ressortit de l’autre côté, dans l’herbe haute de la plaine. Debout sur la pointe des pieds, Amos regarda autour de lui pour tenter de repérer le garçon. Il n’eut qu’une seconde pour apercevoir sa silhouette disparaître de nouveau au loin, à la lisière de la forêt. Pourtant, il était impossible qu’une personne de cette corpulence puisse se déplacer aussi promptement. En quelques minutes, ce garçon avait traversé la plaine aussi vite qu’un homme sur un cheval galopant. C’était d’autant plus incroyable qu’il portait toujours son énorme sac rempli de provisions !

En courant le plus vite possible, Amos se rendit lui aussi à l’orée de la forêt. Par terre, sous le couvert des arbres, il remarqua d’étranges empreintes. Il y avait des traces de pieds, mais aussi de mains. Le gros garçon se déplaçait-il à quatre pattes également dans la forêt ? Plus loin, les traces devenaient celles d’un jeune ours. Pour Amos, il n’y avait pas trente-six solutions à cette énigme : il avait suivi un hommanimal. Oui, le jeune voleur de provisions était un hommanimal ! Cela seul pouvait expliquer sa grande agilité, sa force et sa rapidité. Les jeunes ours sont des créatures vives et puissantes. Cela expliquait aussi pourquoi l’étrange fugitif avait tant de poils sur le visage.

Les hommanimaux n’étaient donc pas que des créatures de légende ! Il existait vraiment des humains capables de prendre une forme animale à volonté ! Les hommes pourvus de ce prodigieux don ne devaient pas être nombreux.

Amos se rappela le couple d’hommanimaux qu’on avait brûlé sur la place publique de Bratel-la-Grande et en arriva à cette funeste conclusion : « Un enfant qui vole de la nourriture pour vivre n’a probablement pas de parents pour subvenir à ses besoins. Je ne vois qu’une explication : les chevaliers de la lumière ont tué les parents de ce malheureux. Ils les ont probablement vus se transformer en animal, en ours sans doute, et les ont brûlés sur le bûcher pour sorcellerie, croyant qu’un humain qui est capable de se métamorphoser en bête peut aussi transformer un individu en statue. Je dois absolument retrouver ce garçon pour lui parler. »

Amos suivit la piste laissée par l’hommanimal. Le trident de la sirène en bandoulière, il s’enfonça dans la forêt. Après une heure de marche, il déboucha sur une petite clairière. Les empreintes menaient à une charmante maisonnette toute ronde, construite en bois. Tout autour de la maison, de nombreuses ruches avaient été installées. Des milliers d’abeilles virevoltaient un peu partout Amos cria sur un ton aimable :

— Il y a quelqu’un ? Répondez-moi… Je ne suis pas ici en ennemi… J’ai suivi tes traces, jeune ours, et j’aimerais beaucoup te parler !

Rien. Pas un son et, à l’exception de celui des abeilles, pas un mouvement perceptible dans les alentours. Avec précaution, le trident relevé, Amos avança dans la clairière jusqu’à la maison, remarquant avec étonnement que celle-ci était dépourvue de fenêtres. Il frappa à la porte.

— Mon nom est Amos Daragon ! Je désire parler à quelqu’un !

Comme il n’y avait toujours pas de réponse, il poussa doucement le battant, jeta un regard circulaire dans la pièce et y pénétra lentement. Une forte odeur de musc le saisit. L’intérieur de cette maison sentait incontestablement la bête sauvage. Amos vit, posée sur un tabouret, une petite bougie dont la flamme vacillait. Au milieu de l’unique pièce, un feu mourant fumait légèrement. La lumière du jour entrait par une ouverture pratiquée en plein centre du toit et par laquelle pouvait s’échapper la fumée dégagée par la cheminée. Sur une table basse en bois étaient posés un bout de pain et un pot de miel. À côté de la porte, tout près de lui, Amos vit le gros sac de victuailles. C’étaient bien celles qui avaient été volées au marché.

Tout à coup, dans un grand vacarme, la table fut traînée et projetée en l’air. Elle alla heurter le mur et retomba avec fracas sur le sol. Aussitôt, un ours au pelage blond bondit sur Amos en hurlant de rage et, d’un seul coup de patte, il le poussa à l’extérieur de la maison. En moins d’une seconde, la bête était sur lui et l’écrasait de tout son poids. Comme l’ours s’apprêtait à lui lacérer le visage avec ses griffes tranchantes comme des lames de rasoir, Amos mit la main sur son trident d’ivoire et le pointa sur la gorge de l’animal. Chacun menaçant de tuer l’autre, les deux combattants arrêtèrent de bouger. Les abeilles, maintenant prêtes au combat, s’étaient regroupées dans un nuage juste au-dessus de la tête de l’ours. Amos comprit rapidement que l’animal exerçait un pourvoir sur les insectes. La bête grognait des ordres à son armée volante. Pour éviter le pire, il fallait maintenant essayer d’entamer un dialogue.

— Je ne te veux pas de mai. J’aimerais te parler de tes parents. Tu m’écrases…

Sous les yeux stupéfiés d’Amos, certaines parties du corps de l’ours reprirent soudain leur aspect humain. Sa tête était maintenant celle du gros garçon du marché. Il avait cependant gardé de la bête d’énormes dents pointues. Son bras droit, encore levé et prêt à frapper, avait conservé la forme d’une patte d’ours, alors que son bras gauche, redevenu normal, plaquait solidement Amos contre terre. Le trident toujours sous la gorge, l’hommanimal dit :

— Je ne te fais pas confiance ! Je t’ai vu plusieurs fois avec les chevaliers. Tu habites même dans une auberge qui appartient à l’un d’eux. Je t’ai remarqué bien avant que tu connaisses mon existence. Tu es un espion et je vais te tuer.

Amos réfléchit un peu. Puis il laissa tomber son arme.

— Bon, alors si tu dois me tuer, fais-le ! Puisque tu me connais si bien, tu dois savoir que je ne suis pas de ce royaume et que je ne représente aucune menace pour toi. Je te conseille ensuite de me manger rapidement. De cette façon, tu ne sauras jamais ce qui est arrivé à tes parents.

D’un signe, le jeune hommanimal ordonna aux abeilles de regagner leurs ruches. Il se transforma alors complètement en humain. Abandonnant toute agressivité, le gros garçon s’assit par terre et se mit à pleurer doucement.

— Je sais ce que les chevaliers ont fait à mes parents. Ils croient que ce sont eux qui ont transformé tous les habitants des villages environnants en statues de pierre. Je ne suis pas magicien, et ni mon père ni ma mère ne l’étaient. Je ne te ferai pas de mal. D’ailleurs, j’aimerais mieux que ce soit toi qui me tues. De cette façon, je serais libéré de ma peine.

En se relevant, Amos vit que son armure de cuir était déchirée. Au niveau de la poitrine, quatre longues marques de griffes traversaient son vêtement. Sans cette protection, il aurait pu être gravement blessé.

— Tu es vraiment puissant ! Comme tu connais déjà la triste nouvelle, je n’ai pas à te l’apprendre. Je suis désolé pour toi. Si je peux faire quelque chose, dis-le-moi. Je serais heureux de t’aider à te soulager de ce malheur.

Le gros garçon parut content. Il sourit. Toute méchanceté avait disparu de ses petits yeux noirs. Ses grosses joues roses, ses favoris longs et blonds et son corps rond le rendaient profondément sympathique. N’eût été ses favoris, ses épais sourcils qui se rejoignaient au-dessus de son nez et les poils qui recouvraient la paume de ses mains, il aurait eu l’air d’un garçon tout à fait normal.

— C’est bien la première fois que je vois un humain qui montre un peu d’amabilité pour un hommanimal ! Je m’appelle Béorf Bromanson, Il reste très peu de gens comme moi dans ce monde. J’appartiens au peuple des hommes-bêtes. Des légendes racontent que les hommanimaux sont les premiers êtres qui ont habité cette planète. Nous avions des rois et des royaumes magnifiques au cœur des grandes forêts. Chaque famille était liée, dans l’âme et dans le sang, à un animal. Il y avait des hommes-chiens, des hommes-oiseaux et un grand nombre d’autres créatures qui avaient la capacité de se transformer à volonté. Moi, je suis de la branche des ours. Malheureusement, les humains ne nous ont jamais fait confiance et ils ont tué beaucoup d’entre nous. En vérité, je n’ai jamais rencontré d’autres hommanimaux que mes parents. Mon père disait souvent que nous étions peut-être la dernière famille de la branche des ours encore vivante sur cette terre. Maintenant, je suis sans doute le dernier représentant de ma race.

Puisque Béorf habitait dans la forêt, pensa Amos, il savait peut-être quelque chose sur cette mystérieuse force maléfique qui faisait tant de dégâts dans le royaume. Aussi demanda-t-il à l’hommanimal s’il savait qui ou quoi transformait ainsi les villageois en statues de pierre.

— Je le sais, je les ai vus ! répondit-il. C’est une longue histoire et je suis trop triste et fatigué pour te la raconter. Viens me voir demain, je te dirai tout ce que je sais sur ces êtres horribles.

Les deux garçons se serrèrent chaleureusement la main et Amos, satisfait de cette rencontre, promit de revenir le lendemain à la première heure. Alors qu’il s’éloignait de la maison de Béorf, Amos entendit des chevaux galoper à vive allure. Revenant sur ses pas, il vit un détachement d’une dizaine de chevaliers de la lumière lancer un filet sur Béorf. Transformé en ours, l’hommanimal se débattait pour sortir du piège. Les abeilles attaquaient sauvagement les hommes en armure. L’un des chevaliers assomma Béorf pendant qu’un autre mettait le feu à la demeure de bois. Lorsque la bête fut inconsciente, les insectes abandonnèrent le combat pour retourner à leurs occupations.

Dans le filet, l’ours avait maintenant repris sa forme humaine. On attacha les pieds et les mains du gros garçon pour ensuite le charger sur un cheval. Amos aurait voulu bondir pour aider son ami. Sa sagesse lui conseilla cependant d’essayer de sauver Béorf autrement qu’en affrontant directement de puissants guerriers. Caché dans les bois, il regarda les chevaliers de la lumière emporter son nouvel ami. De grandes flammes jaillissaient de la maison. Devant ce spectacle, Amos se jura qu’il sauverait l’hommanimal du bûcher. Il se rappela les mots de Béorf : « Malheureusement, les humains ne nous ont jamais fait confiance et ils ont tué beaucoup d’entre nous. »

Dans une course folle, Amos se dirigea vers Bratel-la-Grande.

 

Porteur de masques
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